Être I'ami de Porfirio Rubirosa (1909-1965), c’était nécessairement être l’ami du polo. Sans être joueur lui-même, Pierre Smadja a accompagné « Rubi » sur tellement de terrains que Gunther Sachs le surnommait « le professeur ». Pierre Smadja se souvient avec émotion du capitaine-vedette de la fameuse équipe « Cibao la pampa » qui représentait, à son époque, l'image même du joueur de polo play-boy.*
PIERRE SMADJA* :
« Rubi, s'il n'était pas réputé pour être un modèle de fidélité avec les femmes, est resté toute sa vie totalement fidèle au polo qu'il aimait passionnément.
Rubi n'allait dans un endroit que s’il lui était possible de jouer au polo ; je l'ai suivi à Bagatelle, à Deauville, à Vittel, à Cannes, à Biarritz. Sa participation à un tournoi était un enchantement pour tous tant il apportait de gaieté et de joie de vivre autour de lui.
A cette époque du star-system, Rubi était une vraie personnalité qui défrayait tous les jours la chronique. Les anecdotes sont innombrables et les pages d'un annuaire téléphonique ne seraient pas suffisantes pour les raconter. Quelques- unes me viennent à l'esprit.
Rubi avait institué une tradition au polo que l'on appelait le « collectivo ». Cette tradition consistait à remplir de champagne à ras bord, l'immense trophée de la victoire que l'on avalait ensuite à grandes gorgées, après se l'être passé de mains en mains.
Le polo était toujours un prétexte à des fêtes qui se terminaient chaque fois au petit jour. A Deauville, tous les matins, l'orchestre nous raccompagnait à l'hôtel à travers les rues, le tapage nocturne était à son comble et les vacanciers venus se reposer, appréciaient plus ou moins ce réveil matinal. Leurs protestations n'entamaient pourtant nullement notre bonne humeur.
A l'époque où Rubi était quelque peu désargenté (c'est à dire entre deux mariages), il avait perdu une certaine somme au casino contre l'une des Dolly Sisters et était particulièrement ennuyé. Nous sommes rentrés à Paris pour prendre un peu d'argent et régler la dette d'honneur. A notre retour, M. François André, le propriétaire du casino qui l'attendait, lui lançait en souriant « Je n'ai pas besoin pour Deauville de ton argent mais j'ai besoin de ton polo. » Il avait compris combien Rubi apportait à la station par sa seule présence.
Rubi adorait monter à cheval. Quelques fois je l'accompagnais chez un Russe blanc du nom de Sacha de Hor qui, écuyer de jour, tenait une boîte la nuit : « l'Amiral ».
Cet étrange individu voulait s'engager dans l'armée avec son cheval, ce qui naturellement lui a été refusé à sa grande tristesse. Nous le consolions alors avec force vodkas bien frappées au son des violons tziganes.
Lorsque Rubi arrivait à Paris, il me téléphonait du Palm Beach après une partie de polo victorieuse avec ces simples mots : « Prépare ton foie, j’arrive. »
Tous les joueurs de polo étaient ses amis et je n'en connais pas un seul qui n'en ait pas gardé un merveilleux souvenir.
Je ne peux encore regarder un match aujourd'hui sans penser à ce grand amoureux du polo qui était un amoureux de la vie. »
* Propos recueillis au début des années 1990. Textes extraits du livre de Jean-Luc A. Chartier, "Polo de France" , avec son aimable autorisation.
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