En ce début des années 1920 toute la France militaire et civile joue au polo. A travers le pays de nombreux tournois sont organisés : Biarritz, Bordeaux, Metz, Cannes, Lunéville. Les terrains ne sont pas toujours irréprochables mais l’essentiel est là : le polo commence à connaitre ses heures de gloire.
Texte de Jean-Luc Chartier
Extrait de "Polo de France"
et "Cent ans de polo en France"
Homme de la première heure, et président du Polo de Paris de 1921 à 1934, le duc Decazes est à plus d’un titre l’un des principaux initiateurs du polo en France. Avant même la création du cercle de Bagatelle, il fit partie des premiers passionnés qui découvrirent le jeu sur les pelouses du bois de Boulogne. Toujours innovateur, il participe en décembre 1921 à la création de la Fédération des Polos de France, dont il devient le premier président. Petit tour de France d’un jeu de polo en plein essor.
Polo de Deauville
1922 est une excellente année pour Deauville. En effet, le tournoi organisé du 25 juillet au 10 septembre ne réunit pas moins de 50 joueurs et quelque 200 poneys. Espagnols, Anglais et Français se disputent les différentes coupes. S.M. le roi d’Espagne Alphonse XIII est présent. Sous le nom de duc de Toledo, il prend part activement à de nombreuses parties et remporte notamment le Championnat Continental et la Coupe Gramont.
Face à l'affluence record, le Polo de Deauville envisage pour 1923 la création d'un autre terrain d'entraînement et peut-être même d'un troisième terrain de jeu. 1924, le Tournoi de polo devient l’un des temps forts de la saison équestre de Deauville. Grâce à l’action du duc de Guiche, trois terrains de jeu accueillent cette année des joueurs venus de Belgique, d’Espagne, d’Angleterre, entourés des meilleurs spécialistes français.
Le nombre d’engagés est tel que les cavaleries ne parviennent pas à tenir dans les cent boxes que comptent à présent les écuries. Plus de cinquante chevaux doivent trouver des places de fortune dans des écuries particulières. La duchesse Pénaranda donne le coup d’envoi des épreuves.
Bordeaux, Cannes, Bagatelle
1925. Le tournoi de Bordeaux est le premier de l'année en France. Son déroulement est donc logiquement perturbé par des conditions météorologiques défavorables. Conséquence immédiate : un terrain difficilement praticable et de nombreux joueurs blessés. Le niveau du jeu reste pour autant bon. Comme chaque année depuis trois ans, le spectacle est au rendez-vous.
Comme un chroniqueur le précise : « Les équipes jouent silencieusement, sans cris, sans conseils inutiles, sans ces objurgations bruyantes dont le seul effet est d'exciter l'hilarité des tribunes ». La première journée du 12 février est de loin la plus intéressante, sans doute eu égard à la qualité du terrain encore intact. A cette occasion, le 20ème Dragons gagne son match contre le 24ème d'Artillerie. Par la suite, le 2ème Hussards inflige une correction au 10ème Dragons privé de son meilleur élément. La finale de la Coupe voit la victoire du 2ème Hussards.
Au polo de Cannes, le soleil permet d'oublier l'avalanche d'accidents de jeu. En fait, le tournoi perd tout intérêt après les forfaits sur blessures de quatre des cinq meilleurs joueurs présents. Le palmarès est le suivant : Prix d’ouverture : victoire des Abeilles, équipe composée de P. Brooksbank. B. et W. Balding et du Baron de Bonstetten. American Handicap : victoire de l'équipe composée de W. de Landa, de A. Philippi, de H. de Montbrison et de P. Mager.
Au Polo de Bagatelle, coup d’envoi de la saison le 1er mai. Toujours une superbe affiche avec tous les habitués et quelques illustres invités parmi lesquels Dass Jah Koomar, le neveu du maharajah de Misore, W. de Landa y Escandon, le prince Omar Halim...
Axe Paris-Deauville
En cette année 1929 c'est encore l'axe Paris-Deauville qui affirme sa prédominance, du côté des civils naturellement. A Bagatelle, le club prend chaque année un peu plus d’importance. Les membres peuvent à présent pratiquer conjointement le polo et le tennis. L'essor est tel que le président de la République, Gaston Doumergue, décide de venir assister à un match passionnant, le 29 juin.
Par la même occasion, il fait un don de 500 frs au trésorier du club montrant ainsi sa sympathie et son encouragement aux membres de la Fédération. Le lendemain, la finale de l'Open est remportée par l'équipe des Pingouins (Roger Sauerbach, major Lucas, capitaine de Salis et J.F. Macaire) qui triomphe des Crocodiles (baron Schroeders. Hubert de Montbrison, Henry Couturié, lieutenant de Corcelles) par 5 goals à 4.
La saison de Deauville commence quelques jours plus tard, le 14 juillet. Le succès de ce club est chaque année plus impressionnant. Face au nombre d'équipes engagées, les épreuves se déroulent jusqu'au 8 septembre ; un record ! Au palmarès du Championnat Continental disputé le 31 août : major E. Johnston, Errer, A. Pena, et J.F. Macaire. Ils battent de justesse le comte de Madre, le capitaine F.H. Wilmot, E.H, Tyrrell-Martin et le comte G. du Bourg.
La Coupe de Deauville est remportée par les Tigers (comte G. du Bourg de Boras, lieutenant-colonel B. Mathew-Lannowe, E.H. Tyrrell-Martin et comte Jean de Madre), aux dépens de l'équipe composée du maréchal des logis du Rivau, du capitaine Poupel, du capitaine du Talancé et du major E. Johnston. Les militaires recevant 5 buts perdent néanmoins par 12 goals à 8.
Le polo au Maroc
Parallèlement, le début des années 20 donne l'occasion de tirer un premier bilan de l'implantation du polo au Maroc français. Rappelons que c'est à l'instigation du comte Jean Pastré et de M.F. Piétri qu'avaient pris corps les premières bases de cette organisation, au printemps de 1920. Le Polo de Bagatelle délègue sur le sol marocain le lieutenant Fouques-Duparc pour prendre en main l'initiation et l'entraînement des garnisons.
Au terme de deux années de pratique, trois groupes se détachent : Rabat, Casablanca et Oudjda, alors que d'autres prennent naissance : Marrakech, Meknès... La plus grande difficulté rencontrée dans le développement de ce sport concerne les terrains, jugés suivant les régions trop meubles ou au contraire trop durs. Au niveau des cavaleries, les chevaux locaux, alliant robustesse, souplesse et équilibre s'adaptent facilement au jeu. Ils manquent néanmoins d'un peu de vitesse.
Les années 20 verront s'accroître les efforts de la Fédération des Polos de France pour promouvoir ce sport à tous les niveaux, civils et militaires, sur quatre points essentiels ;
Seconder l'effort des associations rudimentaires en leur procurant du matériel de jeu à des conditions avantageuses.
Programmer les différentes phases du Championnat inter-régimentaire.
Prévoir la préparation de l'équipe française pour les Olympiades de 1924.
Constituer un fonds de réserve pour l'encouragement de l'élevage du cheval de polo en France.
*... la baronne Edouard et la baronne James de Rothschild,. Au milieu, Mrs Harjes. A droite, lady Mountbatten, la duchesse Penaranda et lady Wodehouse. Au milieu à gauche, la duchesse de Guiche, la duchesse de Chaunes et la princesse de Polignac. Au centre, la princesse Caraman-Chimay. A droite, la duchesse Decazes et son fils.
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